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Allergies alimentaires

Un problème à prendre au sérieux
26 Mar 2018

Allergies alimentaires : un problème à prendre au sérieux

Allergies alimentaires : introduction

Il y a quelques temps, un regrettable accident a eu lieu dans un restaurant. Un client allergique au poisson s’est retrouvé aux urgences, gravement malade. Le lieu et les personnes n’ont pas vraiment d’importance car ce type de risque existe partout et pour tout le monde. Nous allons donc plutôt nous concentrer sur ce qui s’est passé, pourquoi c’est arrivé et comment pourrait-on limiter ou supprimer ce risque lié aux allergies alimentaires.

Pour se remettre dans le contexte, voici ce que les médias ont rapporté

Dans un restaurant, un client passe sa commande. Il prévient le serveur qu’il a une grave allergie au poisson et commande un tartare de bœuf. La salle n’est pas très éclairée, le serveur se trompe et apporte à la table de ce client un tartare de saumon. Erreur fatale, le client ne s’en rend compte qu’une fois une bouchée avalée. Trop tard ! C’est le choc anaphylactique. Son compagnon appelle au 911 et le fait transporter aussitôt aux urgences. Le client est gravement intoxiqué et subira longtemps des séquelles : palpitations cardiaques etc.

Quelque temps après, le client engage un avocat et dépose une plainte pour négligence criminelle. Le serveur est arrêté et libéré mais il pourrait être poursuivi en justice.

Objet de la plainte du client : le serveur n’aurait pas fait son travail sérieusement et aurait négligé de transmettre l’information en cuisine suite à sa commande. Il déclare même que le serveur était plus occupé à consommer de l’alcool avec d’autres clients qu’à gérer sa commande et son problème sérieusement. Le serveur aurait donc mis sa vie en danger par négligence. En contrepartie, il faut savoir que le client avait oublié son auto-injecteur d’épinéphrine dans la voiture.

Qui est responsable dans cette situation

Allergies alimentaires : Epipen

  • Le serveur ou, en réalité, le restaurateur puisqu’un commerçant est responsable de son personnel ?
  • Le client qui néglige d’avoir à portée de main l’injecteur qui peut lui sauver la vie ?
  • Sont-ils tous les deux responsables ?

Dans cette série d’articles nous tenterons de répondre à ces questions. Mais auparavant, il me semble nécessaire de faire le tour le plus complet possible de cette problématique importante que sont les allergies alimentaires qui peut briser une vie ou mener un commerce à la faillite.

Généralités sur les allergies alimentaires

L’allergie alimentaire est une réaction d’hypersensibilité du système immunitaire face à une protéine alimentaire. Elle peut être immédiate ou tardive, limitée ou généralisée.

La réaction se manifeste après l’ingestion ou l’inhalation d’un aliment ou encore à la suite du contact d’un aliment avec la peau. L’allergie peut mener à une sévère réaction et peut même conduire à la mort – lire le cas de Myriam. C’est la définition de l’allergie alimentaire extraite du Carnet d’information sur les allergies alimentaires offert par le MAPAQ que vous pouvez télécharger ici.

Depuis quelques années déjà, le milieu de la restauration est confronté à ce que l’on pourrait appeler un phénomène de société si les impacts sur la santé des consommateurs n’étaient pas aussi importants. Le gluten, le poisson, les sulfites, le soja, la liste est longue. Nous y reviendrons un peu plus en détail par la suite.

Mais d’où sort ce mal moderne qui rend la vie parfois très difficile pour certains tant du côté vie sociale que du côté risque pour la santé ?

On ne peut pas vraiment dire qu’il y a une explication toute faite et facile à comprendre. Plusieurs facteurs déterminants entrent en jeu.

L’allergie n’est pas contagieuse et pourtant de plus en plus de personnes en sont affectées. Alors pourquoi ?

Quelques pistes avancées par les scientifiques sur l’origine des allergies alimentaires :

  • La vie actuelle n’est pas forcément adaptée à tous et est certainement quelque part responsable : le stress, la sédentarité etc.
  • Notre organisme sans cesse en contact avec toutes sortes de produits conservateurs et autres additifs dont on ne connaît pas les effets à long terme sur les humains et qui se trouvent dans la nourriture industrielle et affaiblissent petit à petit notre immunité naturelle.
  • Les maladies auto-immunes qui sont de plus en plus diagnostiquées et dont la recherche est encore au stade du grand mystère pour les scientifiques.
  • La pollution de l’air.
  • L’eau qui, malgré qu’elle soit annoncée comme potable, contient beaucoup trop de métaux lourds, sans parler des molécules de tous les médicaments que nous consommons qui sont évacués par les reins et se retrouvent dans l’eau des villes parce que les stations d’épuration n’ont pas encore la technologie pour les supprimer lors du filtrage.
  • Des choix de société favorisant le lait artificiel plutôt que l’allaitement maternel alors que l’on sait depuis toujours que le lait de la maman permet d’immuniser l’enfant contre moult maladies et allergies.
  • Les mutations génétiques qui ont été pratiquées sur certains produits céréaliers comme le blé mais aussi le soja et dont on n’a pas mesuré l’impact sur la santé humaine.
  • L’utilisation depuis trop longtemps des hormones de croissance et des antibiotiques dans l’élevage des animaux de boucherie.
  • Les « traficotages » de la nourriture industrielle des animaux destinés à la consommation en produisant des farines faites à base de produits carnés pour nourrir des animaux végétariens qui ont généré la maladie de la vache folle et tremblante du mouton. Il y a peut-être eu d’autres impact jamais mesurés sur la santé car moins spectaculaires et moins visibles à court terme comme des réactions allergiques.
  • La consommation excessive de certains composants comme le gluten qui se trouve dans une quantité incroyable de produits industriels : nourriture, médicaments et même dans certains cosmétiques. Mauvais gluten et mauvais blé mutés pour augmenter la rentabilité industrielle.
  • L’abus de consommation de certains produits comme les arachides qui sont consommées en quantités très importantes dès la petite enfance menant peut-être à une saturation de l’organisme.
  • Sans parler du lait – consommé en grande quantité par certains – totalement trafiqué qui a perdu sa « vertu » depuis belle lurette.

Bien sûr, il y a beaucoup d’autres facteurs connus ou inconnus qui entrent en jeu mais j’arrêterai là cette liste. J’y reviendrai éventuellement dans un autre article. Pour le moment, revenons au pratico-pratique.

Allergies alimentaires : cuisinier

 

Les allergènes dans l’alimentation

Pour combattre un ennemi, il faut d’abord le connaître.

Actuellement il y a encore un peu de trop de professionnels de l’alimentation qui pensent que les personnes ayant des problèmes d’allergies sont soit des fabulateurs – qui confondent ne pas aimer un produit avec y être allergique – soit des « tamalous » ou des hypocondriaques patentés qui voient des maladies partout. Ce type de personnes existe mais il s’agit d’une minorité, minorité bien pratique parfois pour se dédouaner de notre responsabilité pour tous les autres qui sont réellement confrontés à la maladie.

Ce type d’attitude n’est pas plus raisonnable que de penser que tous les clients sont des voleurs parce qu’un jour le restaurateur a été victime d’une grivèlerie.

Qui sont ces ennemis sournois et cachés ?

Voici la liste des allergènes dit « majeurs » par les autorités compétentes en l’occurrence le MAPAQ au provincial et l’ACIA au fédéral.

Allergènes prioritaires à déclaration obligatoire. Il y en a douze :

  • Amandes, noix du Brésil, noix de cajou, noisettes, noix de macadamia, pacanes, pignons, pistaches ou noix
  • Graines de sésame
  • Arachides
  • Blé ou triticale
  • Œufs
  • Lait
  • Soja
  • Poissons, crustacés, mollusques
  • Graines de moutarde
  • Autres substances à déclaration obligatoire :
  • Gluten
  • Sulfites

source MAPAQ

Même si l’on pense qu’il y a moins de problème à ce sujet en France qu’au Québec, il y a quatorze allergènes majeurs répertoriés. Vous pourrez les découvrir avec une foule de renseignements utiles en cliquant sur ce lien.

Pourquoi ces aliments sont répertoriés et à déclaration obligatoire ?

Simplement parce que ce sont eux qui sont actuellement responsables du plus grand nombre d’accidents. La liste est mise à jour lorsque c’est nécessaire, comme les graines de moutarde ajoutées il y a quelque temps.

Tous ces allergènes doivent être identifiés sur les étiquettes des produits emballés prêts à vendre. Pour ceux qui sont servis directement au client comme un entremets, une tarte ou une salade composée par exemple, une liste d’ingrédients les composant devraient être disponible pour les clients qui ont des allergies et qui en font la demande. Un simple petit feuillet imprimé sera parfait.

En offrant ce service au client, vous lui démontrez que sa santé vous tient à cœur, ce qui est une excellente image pour l’entreprise. Par la même occasion, vous prouvez votre professionnalisme en prenant très au sérieux un point critique à maîtriser : le risque de contamination chimique par les allergènes.

Ces allergènes sont-ils les seuls ?

Pas du tout, il y a une liste assez impressionnante, malheureusement, d’autres allergènes qui, malgré qu’ils soient moins couramment en cause, n’en demeurent pas moins dangereux.

Rappelons-nous que la loi nous impose de maîtriser les points critiques dans l’entreprise comme les risques chimiques : allergènes et produits nettoyants, biologiques : bactéries et virus ou physiques : cailloux dans les lentilles et cheveux.

Voici les plus courants et la liste n’est pas exhaustive : mangue, banane, basilic, kiwi, ananas ou encore qui provoquent des intolérances comme le glutamate monosodique de sodium etc.

Il existe aussi un risque plus rare mais aussi dangereux : l’intolérance aux protéines de bovin. À ce propos, permettez-moi de vous raconter une mésaventure arrivée à un boucher chevalin à qui j’ai donné une formation en hygiène.

Cas concret

Notre boucher, qui ne propose que de la viande de cheval à ses clients, reçoit une mise en demeure de la part d’un avocat.

Une de ses clientes est gravement intolérante aux protéines de bovin. Après avoir consommé de la viande achetée chez-lui, elle tombe malade et se retrouve hospitalisée plus de deux semaines. Elle intente à son encontre une poursuite de 500.000$ en dommages et intérêts. Le boucher est abasourdi : il ne manipule jamais de viande bovine dans ses locaux. Il se voit contraint de prendre un avocat au Québec et un aux Etats-Unis, puisqu’il achète ses carcasses là-bas, afin de prouver sa bonne foi.

Après enquête, il sera démontré que le propriétaire de l’abattoir avait accepté de stocker des carcasses de bœuf dans sa chambre froide pour dépanner un ami qui donc responsable et le boucher disculpé. La cliente est insolvable, le boucher a assumé seul les frais d’avocat engagés de 200.000$ !

Le boucher m’a expliqué qu’il a vendu deux de ses trois boucheries pour payer. Il aurait sans doute pu poursuivre l’abattoir mais imaginez l’investissement en temps et en argent, sans aucune certitude de récupérer sa mise.

On peut faire l’autruche en refusant de prendre ces problèmes au sérieux mais les conséquences peuvent être graves pour la santé du client autant que pour la santé financière de l’entreprise.

Allergies alimentaires : les risques et les responsabilités

Comment s’y prendre pour bien informer le client ?

Ce n’est pas aussi compliqué qu’on l’imagine si l’on suit la première recommandation :

Ne jamais rien garantir à son client !

Si le client signale une allergie grave, c’est la première chose à lui dire.

Par exemple, vous accueillez un client fortement allergique aux arachides. Même si vous n’en utilisez pas dans votre cuisine, il faut lui expliquer que d’autres aliments pourraient avoir été contaminés par contact chez votre fournisseur, pendant la livraison ou simplement par un employé qui mange des arachides qu’il a apportées de chez lui. Même s’il est interdit de consommer de la nourriture pendant la manipulation des aliments, une négligence peut toujours survenir.

Mettez une petite affichette bien en vue près de la caisse, à l’accueil et même sur les menus avec cet avertissement :

Tous nos produits peuvent contenir

ou avoir été en contact avec les allergènes

 

Allergies alimentaires : serveur

 

Le rôle du personnel de service

Les employés affectés au service sont en première ligne. Une formation spécifique devrait leur être dispensée afin qu’ils développent les bons réflexes.

Le risque étant bien réel, il est important que chacun à son niveau sache ce qu’il doit faire pour répondre aux besoins spécifiques des clients. En salle, être à l’écoute du client et transmettre les instructions en cuisine. Être attentif et professionnel lors de la livraison des plats pour éviter les confusions.

 Le rôle du client

La plupart des personnes atteintes de ce type de maladie savent ce qu’elles peuvent faire ou non et le gérer. Pour les allergies complexes comme celles aux œufs ou aux sulfites ou encore les intolérances graves au gluten (cœliaque), en général les personnes atteintes évitent de manger dans un restaurant en dehors de ceux qui peuvent garantir leurs produits sans allergènes.

Les circonstances particulières

Certains clients ne vont pas oser prévenir le serveur de leur problème. Je conçois que c’est imprudent mais comme il vous sera difficile de refaire la nature humaine le temps d’un service, mieux vaut donner la possibilité au client de vous prévenir de son allergie ou de sa maladie discrètement.

Le serveur pourrait simplement demander au client au moment de prendre la commande : Y-a-t-il des aliments que vous n’aimez pas ? Si le client vous répond : je n’aime pas le pain ce pourrait être une façon subliminale de vous dire : attention j’ai la maladie de cœliaque. Il faudra donc déconseiller tous les plats qui contiennent du gluten.

Tout cela peut vous sembler compliqué et un peu exagéré mais je vais vous donner deux exemples qui devraient vous aider à comprendre.

Allergies alimentaires : restaurant

 

Exemple 1 – Imaginons un repas d’affaire

Le patron d’une entreprise invite sa responsable des ventes (nous allons l’appeler Claudia) au restaurant. Pour Claudia, c’est le signal que son patron va lui offrir le poste de direction des ventes qu’elle convoite depuis plusieurs semaines après la démission du directeur actuel.

Claudia à la maladie de cœliaque… Pensez-vous vraiment qu’elle va annoncer au serveur : surtout pas de gluten pour moi car j’ai la maladie de cœliaque ! Quel message pensez-vous qu’elle imagine transmettre à son patron qui ne sait peut-être pas trop de quelle maladie il s’agit ?

– « Attention, maladie veut dire absentéisme fréquent, ce n’est peut-être pas une bonne idée de lui confier ce poste. »

Exemple 2 – Une situation plus personnelle

Allez, je reprends Claudia pour me faciliter la tâche.

Donc Claudia est invitée par un charmant garçon dont elle est amoureuse depuis pas mal de temps, il est amoureux aussi mais trop timide pour lui déclarer sa flamme. Il finit par se lancer et le soir tant attendu arrive. Il l’invite au restaurant.

Pensez-vous que pour ce premier rendez-vous Claudia va tout de go annoncer sa maladie devant lui et le serveur ? Non bien sûr !

Le personnel de service a un rôle important à jouer pour le confort et la sécurité du client à tous les niveaux.

Allergies alimentaires, un problème à prendre au sérieux

Même s’il est impossible de garantir quoique ce soit, un établissement a quand même la responsabilité de tenir compte de la maladie du client quand il la signale, en ayant des méthodes de travail en cuisine et en salle qui permettent d’éviter les contaminations croisées. Il est important de connaître les allergènes majeurs pour être en mesure d’informer le client qui le demande. Il faut aussi vérifier ses achats, lire les étiquettes, sélectionner des fournisseurs fiables, former le personnel et accessoirement connaître les gestes qui sauvent.

Tous ces éléments seront étudiés de près dans le prochain épisode de la grande saga des allergies alimentaires. La suite très bientôt…


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